Je ne peux
commencer ce nouvel article que par une phrase un peu désuète: Je suis en
colère.
En me promenant
dans un kiosque, je tombe sur « Le Matin du 14 août 2015 » dont le
titre en première page est le suivant : Art ou provoc ? Le nu en ville choque, évidemment en lettre blanche sur fond rouge et en
majuscule pour attirer le quidam que je suis. Je me penche donc sur cette
question.
C’est au sujet du
Festival sur la nudité à Bienne qui regroupe 18 troupes professionnelles :
« Body and Freedom ». Pour moi, rien que le titre me donne de
l’espoir en l’être humain ! Le principe est le suivant: des gens totalement
nus font des représentations dans la ville ou simplement des gestes du quotidien.
Des personnes de tout âge, de tout horizon et de toutes les couleurs.
Ils ne sont même
pas dans les rues les plus passantes, et qui plus est, les gens choqués par
cette nudité auront même le luxe de l’éviter en passant par des bordures de la
zone autorisée, construites à cet effet.
Bien. Le nu
choque ? Et les photos des enfants qui vivent la guerre, est-ce que cela
choque ? Les filles à peine majeures couchées sur des bagnoles au salon de
l’auto, dans des positions lascives et surmaquillées est ce que cela
choque ? Les séries télé qui regorgent d’hyperviolence, d’exécutions, de
viols...qui passent à des heures tout à fait descentes sur toutes les chaînes? Les
clips de rap, avec des nanas en string qui se trémoussent pour faire déco ? Les
jeux vidéo dont le héro est un soldat qui va tuer la moitié de la planète ?
Ça vous choque ? Et monsieur le puritain qui va détourner son regard de ce
nu si provocateur, a-t-il une connexion internet sur son smartphone lui
permettant d’accéder à Youporn à tout
moment ?
John Lennon a
dit : « Nous vivons dans un
monde où l’on se cache pour faire l’amour… mais la violence est faite en pleine
lumière du jour. » D’accord. Je vous entends penser. C’était John
Lennon, l’amour libre, les babas cool allumés qui croyaient pouvoir refaire un
monde meilleur, gorgés de psychotropes. Leurs idéaux peuvent paraître niais au
jour d’aujourd’hui, mais n’avaient-ils pas raison ? Raison de croire en ce
que l’humain a de si précieux ? L’amour universel, l’abolition des classes
sociales, l’amour libre et dans les champs, la non-appartenance, la liberté,
bordel ! Est-ce que jouer de la guitare à poil dans une forêt, en
regardant pousser les fleurs, faisait du mal autour d’eux ? Forcément une
telle révolution ne pouvait pas durer, l’humain n’est-il pas là pour s’empêcher
de vivre libre ?
Moi je veux des
gens à poil dans les rues, qui nous montrent que les affiches de jeunes prépubères
photoshopées ne sont pas LA réalité.
Que c’est beau un
corps avec ces défauts! Mettez-vous à poil devant un miroir et regardez-vous et
aimez-vous. Oui, vos kilos en trop sont beaux, oui, votre cicatrice de
césarienne est belle, oui, vos genoux trop en dedans, vos pieds plats, la
vieillesse, les seins tombants et pâles, les poils dans le dos, les épaules
basses, le ventre rond, les paupières fatiguées, les rides aux coins des yeux,
les marques du temps, les bienfaits de la jeunesse, les fesses plates, les
poitrines menues... C’est de l’art à l’état pur.
Avec ce corps vous
pouvez vous déplacer, aimer, penser, donner la vie, danser, rire. Votre corps
est votre compagnon de tous les jours. Quand allons-nous décider de le chérir
comme un ami et de l’accepter avec toutes ces imperfections ? Alors, ça ne
nous fera plus peur de le croiser dans une rue.
Le charmant
Mathias Müller, vice-président de la section locale de l’UDC donne cet argument: « Les
passants se verront imposer la vue de ces nus sans rien avoir demandé ».
Moi, je n’ai pas demandé des centaines d’affiches de pub qui me vrillent le
regard tous les jours, je n’ai pas demandé à voir des gens pour qui la vie est
faite que d’apparence et de bling bling, je n’ai pas demandé à voir des
personnes tristes vêtues de gris qui avancent en masse tels des zombies, ils me
sont imposés tous les jours et je fais avec. Monsieur Müller s’inquiète également de la nuisance que cela peut avoir
sur la ville. Surtout que cette fois, le festival a été subventionné par cette
dernière. Elle a versé CHF 10’000.- pour cela. Quelle honte !!! On aurait
pu les verser à l’armée ? C’est tellement plus joli un homme en uniforme
dans sa toute puissance guerrière. Ou alors, pour le prix un joli autocollant
pour le Gripen ou une demi hélice de drone ?
Heureusement que
Monsieur Thomas Zollinger, l’organisateur qui a obtenu l’autorisation pour ce
festival… après cinq ans de négociations (!?!?) avec la ville est là pour nous
permettre, de nous réapproprier le corps, sans provocation. Cet événement est
une première mondiale, tout de même.
Alors moi je
dis : Bravo, Monsieur Zollinger ! Je dis Bravo Bienne, d’avoir dit
OUI. Et pour l’occasion, je vais aussi me mettre à poil pour communiquer un
message de paix, d’amour, de liberté et d’art autour de moi. Et si je devais
choisir de vivre à poil dans une fermette avec des fleurs dans les cheveux ou alors
habillée dans une maison d’architecte en béton, mon choix serait très vite
fait.
Aimez vous, tous à
poil, et comme dirait ma copine Sévrine, n’oubliez pas de danser !
Bravo joli elfe des jardins !
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