mercredi 29 avril 2015

Du Palace au Vide grenier



Je farfouille depuis plus d’une heure dans des tas de fripes, de sacs, d’appareils en tout genre. Je suis dans un vide grenier, et j’adore ça. C’est la découverte à chaque fois. Des souvenirs d’enfant au côté très pratique, le vide grenier m’offre une palette d’émotions que je ne trouve pas chez Coop.

Le concept est génial et effrayant également : on recycle, on passe, on troque, on arrête de jeter à tout va, on partage, on s’anime, on marchande, on se fait plaisir à petits prix et on est dans l’unique, plus dans la copie. Et en même temps j’ai toujours un petit creux dans le ventre quand je vois le nombre d’objets vomis par les stands trop petits pour tout contenir, qui ne sont plus désirés par leur propriétaire. Cela veut dire que notre surconsommation dépasse l’entendement.

Retournons à nos moutons, dans le tas que je suis en train de  farfouiller, je découvre une imitation du célèbre sac signé LV, je le saisis et plonge dans mes souvenirs...

…Je me retrouve, quelques années auparavant, devant la porte de la célèbre boutique Louis Vuitton, rue de Bourg Lausanne. Mon cœur bat la chamade de pouvoir accéder à cette légende. Il faut avouer que je suis une fan inconditionnelle du sac à main en tous genres, alors le Vuitton doit forcément faire partie de la collection.
Mon ex-mari me tient la porte, et nous entrons. A peine le bout de mes escarpins posé sur la moquette parfaite de ce lieu plus propre qu’une salle d’op’, une vendeuse arrive pour prendre notre veste, nous montrer les articles avec le plus grand raffinement possible. Après de longues minutes, j’opte pour un sac assez large et pratique dans lequel je pourrais mettre tout mon bataclan. Le sac n’allant pas sans le porte-monnaie, je finis par choisir un long portefeuille avec un intérieur rouge magnifique.
Moi et mon sourire suivons mon ex-mari pour le passage en caisse. CHF 1518.- plus tard, je repars avec un très joli sac en papier, que je vais aller poser dans un Palace. C’est usant le shopping !

Les Palaces. Aaaahhh les palaces… ils se ressemblent par leur odeur, la qualité des tapis, des meubles, des draps… les salles de bains qui n’en finissent plus et des téléphones partout. Je goûte durant cinq ans à ce luxe. Rien n’est un frein. Une voiture s’achète aussi facilement qu’une chemise, les voyages ne sont pas limités, les matières sont de plus en plus fines, nobles. Ma carte de crédit est ma copine de guerre et de paix. Mes vides sont vite comblés par des achats futiles, il faut bien l’avouer. 

L’argent donne une sécurité indéfectible, il rassure. Savoir que les factures seront payées sans le moindre tressautement de paupières, aide indubitablement à s’endormir.
L’argent donne une prestance. Habillée de marque le menton fier, on ne vous reçoit pas pareil que le quidam lambda.
Quand vous êtes riche, vous faites des brunches le dimanche chez des médecins et des avocats. Vous vous exclamez devant un plat à la truffe même si elle est servie sur une crotte de yak. Vous entendez des quasi orgasmes de bourgeoises (je dis quasi parce que la bourgeoise parfois peine un peu à jouir et s’emmerde sévèrement avec Jean-Louis), alors ça donne un petit « hi » hystérique quand elle voit votre sac griffé. Elles peuvent le commenter de A à Z, et vous confier toutes ses déclinaisons possibles, car elles ont forcément le même, et reçoivent aussi la newsletter de chez nos amis Vuitton.

Aux brunches du dimanche, (prononcer « Broêêntch »), vous vous devez d’échanger sur les nounous et les femmes de ménage. Savoir laquelle de ces quadras de riches mal baisées pourraient vous trouver le numéro d’une technicienne de surface « enfin valââââble », car avec vos deux heures de bénévolat par semaine pour les enfants démunis, pas possible de vous en sortir avec les 350m2 de carrelage imitation bois fossilisé, sans compter le jardin, évidemment.

Je ne me suis jamais vraiment fondue dans cette caste de nantis, car je ne crois pas avoir un caractère qui se fond dans quoique ce soit. Mais j’ai bandé il est vrai devant des ouvertures que je ne pouvais avoir qu’en était munie de la Gold et non de la carte Raiffeisen. Si, si….

Après donc cinq années de vie quasi commune avec mon ex-mari, nous décidâmes avec humour de divorcer avec classe. A l’amiable, sans colère, nos chemins se séparaient dans un carrefour d’âges où l’amour n’était pas la question, mais les chemins différaient.

C’est alors que j’ai re-rencontré mon mari actuel (qui fut mon premier amour à 16 ans), et avec lequel, je me suis élancée dans un second mariage, beaucoup plus gitans que bourgeois.

Les palaces ont été remplacés par un vieil appartement commun avec des dessins et des rires d’enfants partout. Les sacs Vuitton par des sacs de seconde main. Les brunches par des pique-niques. Et les voitures par… par… ben… par rien !

C’est pour cette raison, qu’aujourd’hui, je marche avec dans ma main mon panier plein de puzzles, de fringues, de jeux… car j’ai décidé de ne plus acheter en 1ère main pour des raisons écologiques et aussi pour des questions de budget. Je n’ai plus la Gold, ni même de carte de crédit. Je vis avec un salaire pour quatre personnes, mais j’ai le même plaisir à aborder un vide grenier qu’une boutique Vuitton. Elle est pas belle la vie ?


Mais entre nous, il faudrait être con, pour ne pas avoir envie de passer de la bourgeoise épanouie à la gitane heureuse, non ?

mardi 28 avril 2015

Coup de colère : Bashung et moi.



Cette histoire est authentique. Âmes sensibles, s’abstenir.

Par un beau matin de printemps de ce doux mois d’avril 2015, je monte nonchalamment les marches de chez Manor, pour aller m’acheter le dernier album d’Alain Bashung : « Bleu pétrole ».

En débarquant dans les rayons, je recherche dans « variété française », sous la lettre B (jusqu’ici il me semble que je maîtrise la situation), le nom si célèbre de ce Monsieur. Ne trouvant pas après plusieurs minutes, je décide de me rendre en caisse:

« Bonjour Monsieur, je cherche l’album « Bleu pétrole » de Bashung ». Me regarde alors un jeune boutonneux de 15 ans mon cadet, qui me dit d’un air connaisseur : « Okay, heu c’est un groupe récent ? C’est un album qui vient de sortir ? »

Je pourrais m’arrêter là, et juste écrire No Comment. Mais ce serait ignorer la colère et l’anéantissement qui m’a saisi à ce moment là. « BASHUNG ????? » me suis-je écriée ! « Mais je connais pas tout ! » me répond-il du tac au tac, genre je te prends de haut, ma vieille.

Le petit blanc bec prend sa tablette et se lance dans une recherche après m’avoir demandé d’épeler le nom (là je mords gentiment mon sac à main, heureusement il bénéficie d’une zone renforcée dans l’anse, le sac à main, pas le vendeur).

« Voilà, j’ai trouvé ! »
Cool, j’ai cru y passer ma matinée. Et là il me dit : « Ah mais ça, on n’a pas en stock ! ». Ben non, mais pourquoi avoir la compilation des chants des baleineaux alors ? « Je vous le commande, ça fera CHF12.90 ». Je sors mon petit billet et je paie en me disant qu’une page encore se tourne. Si je ne trouve plus du Bashung dans les bacs de CD et qu’ils ne coutent que CHF12.90, c’est le début de la vraie fin. Alors je me dois une dernière explication avec « gras du cheveux » :

« Okay, comme tu dis mon petit, mais tu vois, Bashung ce n’est pas n’importe quel petit boys bande à la con auquel tu dois ton horrible coupe de cheveux trop laquée qui te provoque des excès de sébum sur le front ; Bashung, que tu aimes ou que tu n’aimes pas, d’ailleurs, c’est trois récompenses, dont celle de l'interprète de l'année et du meilleur album pour Bleu pétrole aux 24èmes Victoires de la Musique, il était devenu l'artiste le plus primé de l'histoire de la cérémonie avec un total de douze  trophées, dont un posthume. Et la Légion d’Honneur ! Et même s’il n’avait reçu aucun prix, c’était un auteur-compositeur- interprète et comédien français de génie. Ça ne te dit toujours rien ? »

Non ? Oui je dis « était » car il est mort en 2009. Et non ce n’est pas une excuse pour que tu ne connaisses pas, car en tant que vendeur au rayon musique, je souhaite que tu connaisses également les artistes décédés. Et je vais te donner un filon : « Gaby » ce n’est pas la marque d’un yaourt O%.