C’est la rentrée.
Moi je le sais parce que mon mari est prof. Et lui, il le sait aussi parce que
comme chaque année depuis 23 ans, il a des boutons aux coins des lèvres et il
se ronge les ongles jusqu’à la 2ème phalange. La rentrée scolaire,
c’est comme Noël. Sauf qu’il fait beau et qu’il n’y a pas de cadeaux. C’est
chaque année, on le sait, mais on dit tous une phrase du genre :
« déjà la rentrée ?! » ou « Déjà Noël ?! ». A
première vue, on ne s’y habitue pas.
Pour moi, c’est
facile, je n’ai que fille aînée qui reprend l’école et qui est dans une routine,
dirais-je.
Et mini-pirate a
encore une année de liberté devant elle ; avant les 78 ans qui lui restent
de contraintes, de tests scolaires, professionnels, de choix, de notes, de
comparaisons, de ballons dans la tronche à la gym. Alors cette rentrée est
plutôt soft pour moi, c’est pour cela que j’ai le temps de regarder les autres.
Vue par une
majorité de parents :
Pour ceux dont les
tendres enfants commencent en ce joli mois d’août, on sent une effervescence
dans les rayons de la Migue, proche de l’hystérie. Va-t-on opter pour le look
total « Reine des Neiges » ou saupoudrer par ci, par là, de Mickey, Cars, Planes, Spiderman, et j’en
passe… Aura-t-il assez d’un plumier à 12 étages ou serait-il mieux d’acheter 5
trousses afin de différencier les stylos des crayons, les gommes des néocolors, et les règles des compas. Et
le sac ? Sur roulette pour ne pas qu’il se fasse mal au dos, mais il a
l’air con. Ou le sac à dos, avec risque de double scoliose dans quelques
années ?
Et les
habits ? Et la coupe de cheveux ? Et la récré ? Et... Et...Et...STOOOOP.
Bon, je sais qu’au
jour d’aujourd’hui l’école nous demande un peu de matériels, certes, chers
parents, mais je tiens tout de même à vous rassurer sur le fait qu’il existe
encore quelques crayons qui trainent de ci de là entre deux ordis dans les
classes. Donc il est inutile de lui acheter un scaphandrier pour la piscine.
Mais les parents,
ils achètent plein de trucs à leurs enfants pour deux raisons : la
première c’est parce qu’ils aimeraient que Dylan ou Marjorie soit le ou la plus
belle de l’école. Celle qui suit la mode, mais en lin bio quand même un peu,
même si on lui met aux pieds, des chaussures fabriquées par des petits Coréens
(qui, eux au moins ne se posent pas tant de questions pour la rentrée).
Mais aussi parce
qu’ils culpabilisent. Car eux, ils sont drôlement contents que leur enfant
commence ENFIN l’école !!!! Combien de mamans que je croise - et je ne
vous juge pas, Mesdames - me disent : « c’était le fin moment !
Je ne savais plus quoi faire avec mes enfants ». Ben heureusement qu’ on
commence l’école à 4ans et pas à 6 comme dans notre tendre enfance ! Parce
qu’on devrait se les coltiner encore 2 ans. Pffff….
Bon je fais partie
des mamans fusionnelles, qui se disent que c’est si bon de les voir encore sans
préoccupation ni obligation courir dans les champs. Mais je crois que c’est
vraiment mon problème parce que mini-pirate elle se réjouit à fond. Comme
dirait ma copine Rosemonde, on ne parle que de soi.
Vue par mon
enseignant de mari et mon enseignante de sœur (oui j’ai un duo-pack de bons
conseils) :
La rentrée, c’est
le début de la catastrophe. Les 25 semaines de vacances ont passé tellement
vite, on est tous sur les genoux parce qu’on a tellement donné aux gosses. On
se promet que l’année prochaine, on les mets tous en colo.
Mais la rentrée,
elle, commence par l’ouverture du mail de l’horaire 2015-2016. Et là, au rythme
de spasmes, mon mari émet des sons inconnus jusqu’alors. Entre des supers gros
mots et des sons proche de l’extase, je sais alors si l’année va être difficile
ou pas.
Là, ça va. Bon il
finit quand même trois fois à 16h50 mais dans l’ensemble il est assez content.
Je ne ramènerai pas ma sempiternelle rengaine sur l’emploi du temps des
enseignants. Car j’ai moi-même arrêté l’Ecole Normale pour faire des horaires
de 7h-18h30, alors je me tais. J’ai choisi.
Et ensuite, il y a
la phrase : « je vais jamais y arriver », et c’est là que je
prends du temps pour lui dire que c’est sa 23ème rentrée donc que ça va aller,
et qu’il assure et que c’est LUI le meilleur. Mais en vain, il faut bien 2-3
semaines de rodage pour que la confiance revienne.
Ok, là, je me
moque un peu. Mais je me dis, quand je vois 23 élèves de 11ème
sortir de sa classe - tous l’air plus vieux que moi - que je ne pourrai en
aucun cas enseigner. Je pense que je me ferais pipi dessus de peur.
Ma sœur, elle, se
préoccupe assez tardivement de sa rentrée, mais a décidé de mettre ses enfants
en école privée : c’est dire qu’elle croit fort en l’école publique. Elle
enseigne en enfantine.
Pour vous donner
des nouvelles de mes deux guerriers partis au front le 24 août à 8h15 tapantes,
tout s’est bien passé. Mon homme n’a eu qu’une lapidation à coups de craies
d’un élève sur une autre fille. Et ma sœur, tout tranquille aussi : deux
se sont barrés, un a vomi aux 4 coins de la classe, 12 pleuraient à perdre leur
première dent et un seul s’est cassé l’arcade sourcilière en jetant son
camarade sur le bord de la table. Ma sœur est saine et sauve.
Il y a aussi tous
les enseignants qui sont très contents de recommencer, car ils en ont plein le
fion de s’occuper de leurs mômes. Ou alors, parce que leur vie, c’est leur
savoir à transmettre. Respect. Minute de silence.
Vue par les
enfants :
Alors là c’est un
mystère que je n’explique pas trop. Il y a tellement de cas différents. Pour
faire bref : ceux qui vomissent de peur 4 jours avant, ceux qui se réjouissent
parce que les vacances « ça va un moment », ceux qui s’en foutent,
ceux qui savent qu’ils fugueront le premier matin, ceux qui rentrent enfin dans
le grand collège, ceux qui retrouvent l’être aimé après de longues semaines,
ceux qui commencent leur dernière année et qui se projettent dans leur vie
d’adulescent…
En tous les cas,
ce 24 août passé sonnait le glas de la fin de l’été, de l’insouciance de
l’horaire, de la chaleur excessivement bonne et sentait l’odeur des tableaux
noirs et des baskets neuves.
Pour moi, la
rentrée…
…c’est retrouver
un peu ma liberté. Je n’ai plus un mari à temps plein à la maison et au vu de
ma grande indépendance cela me fait du bien de reprendre la barre.
C’est aussi le
signe que les années filent et quand je regarde en arrière, je me dis que moi,
les rentrées, je les ai jamais aimées.
Et dans une année,
c’est Mini-pirate qui prendra le chemin de l’école, le sac Cars collé dans son petit dos, la joie et l’entrain dans ses
petites jambes et un grand sourire de faire partie des « grands ». Et
moi, là je vous écrirai combien j’ai pleuré devant le portail de la
« grande école ».
Midinette je vous
dis. Ou pas.
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